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La COP16 : Objectifs, enjeux et bilan après une semaine de négociations

Lorraine E. Publié par Lorraine E. - le 30 oct. 2024 à 12:30
La COP16 : Objectifs, enjeux et bilan après une semaine de négociations

La 16e Conférence des Parties (COP16) à la Convention sur la diversité biologique se déroule actuellement à Cali, en Colombie, du 21 octobre au 1er novembre 2024. Cet événement rassemble 196 pays avec pour mission de négocier des actions urgentes pour préserver la biodiversité. Dans le prolongement de l'Accord de Kunming-Montréal signé le 19 décembre 2022, où les nations s’étaient engagées à protéger 30 % des terres et des mers, restaurer 30 % des écosystèmes dégradés, réduire l’usage des pesticides de moitié et limiter l’introduction d’espèces exotiques envahissantes, la COP16 vise à approfondir ces engagements et à mobiliser des financements pour concrétiser des mesures face à l'urgence écologique.

À quoi sert la COP16 ?

La COP16 se concentre sur la mise en œuvre d’objectifs concrets pour protéger et restaurer la biodiversité. Ses missions principales incluent :
Vérifier et renforcer les engagements de l’Accord de Kunming-Montréal.
Mettre en place des mécanismes de financement efficaces pour soutenir la conservation et la gestion durable des écosystèmes.
Réguler les activités humaines qui perturbent les équilibres écologiques.

En parallèle, la COP16 inclut la onzième réunion de la Conférence des Parties au Protocole de Cartagena sur la biosécurité, ainsi que la cinquième réunion de la Conférence des Parties au Protocole de Nagoya, qui porte sur l'accès aux ressources génétiques et le partage équitable des bénéfices de leur utilisation.

La COP16 aura un rôle important à jouer dans la mise en place d’une politique internationale de protection de la biodiversité, dans le cadre de la Convention sur la Diversité Biologique. 

Enjeux principaux de la COP16

L'Accord de Kunming-Montréal, établi lors de la COP15 en 2022, a fixé 23 objectifs pour la préservation de la nature d'ici à 2030. Cette année, les débats de la COP16 abordent des enjeux qui vont bien au-delà de la simple conservation :

 

  1. Financement de la Conservation
    Pour que les pays en développement puissent protéger la biodiversité malgré des priorités économiques urgentes, un soutien financier conséquent est essentiel. Les négociateurs discutent de nouvelles ressources et de financements justes pour soutenir ces efforts sans compromettre le développement économique.
  2. Régulation des Activités Humaines
    L’agriculture intensive, l’exploitation minière et la déforestation menacent gravement la biodiversité. La COP16 cherche des solutions pour équilibrer protection des écosystèmes et développement durable.
  3. Inclusion des Communautés Locales
    Les peuples autochtones, souvent en première ligne pour protéger la biodiversité, jouent un rôle central. La COP16 entend renforcer leurs droits et leur rôle dans la gestion durable de leurs territoires.
  4. Protection des Écosystèmes Marins
    Face à la surexploitation des ressources halieutiques, l’un des défis majeurs est de créer des zones de protection marine pour préserver la biodiversité marine.
  5. Adaptation aux Changements Climatiques
    Dans un contexte où les écosystèmes sont vulnérables aux variations climatiques, les objectifs de la COP16 doivent s'aligner avec les actions climatiques mondiales.

 

Ces discussions visent également à établir un processus de revue rigoureux, avec des critères clairs pour évaluer les progrès d’ici à 2026, en vue de la COP17. Ce suivi est essentiel pour transformer les engagements en politiques concrètes et éviter le risque de promesses non tenues.

Le Rôle du Secteur Privé : Prévenir le "Greenwashing"

Les 196 États présents à Cali discutent aussi de la mise en place de règles spécifiques pour le secteur privé afin d'éviter le "greenwashing" (ou "écoblanchiment"), une tendance où les entreprises affichent des engagements environnementaux sans actions concrètes. La COP16 vise à instaurer des obligations et une transparence accrue pour s'assurer que les actions des entreprises contribuent réellement à la conservation.

Bilan après la première semaine de négociations

Après une semaine de conférences, un bilan préliminaire indique une forte mobilisation, mais peu d'engagements formels. Les débats ont largement porté sur la question du financement, avec des tensions entre pays industrialisés et pays en développement. Parmi les désaccords notables :

 

Le financement de la biodiversité : Depuis la COP15, un nouveau fonds de biodiversité a été promis. Cependant, les pays bénéficiaires demandent que ce fonds devienne indépendant du Fonds pour l'environnement mondial et dispose de sa propre gouvernance. Les donateurs, quant à eux, plaident pour que le GEF, bras financier de la Convention, administre cette instance. Par ailleurs, si les pays les plus riches assurent que le fonds mondial pour l’environnement fonctionne déjà bien, les pays du groupe Afrique, et notamment la RDC et l’Afrique du Sud, réclament à nouveau un fonds dédié à la biodiversité.

 

Actuellement, le Fonds pour l’environnement ne contient que 400 millions de dollars, alors que l’accord de Kunming-Montréal prévoit 25 milliards de dollars par an d'ici à 2025. 

 

Le partage des bénéfices génétiques : Des débats se poursuivent pour établir un mécanisme qui redistribuerait les profits liés à l'utilisation de données génétiques extraites, souvent dans les pays du Sud. Ce dispositif soulève des questions complexes, surtout sur le champ d’application (entreprises concernées, contributions obligatoires ou volontaires) et les modalités de gouvernance. Il faudra définir comment et à quel point les entreprises pharmaceutiques, cosmétiques ou agroalimentaires vont payer pour avoir gagné de l’argent en utilisant des données génétiques des plantes et des animaux.

Vers des projets innovants et un engagement accru

Malgré les défis, certaines avancées sont en cours. Les pays en développement proposent un système de "crédit biodiversité" pour récompenser les pratiques durables, inspiré des crédits carbone. 

 

Le président brésilien Luiz Inacio Lula da Silva soutient depuis un an la création d'un Fonds international de préservation des forêts tropicales, qui permettrait de rémunérer 80 États pour chaque hectare de forêt préservé ou restauré. 

 

La deuxième semaine de la COP sera déterminante pour observer si des compromis solides peuvent être atteints et si les objectifs pour 2030 sont sur la bonne voie.